Il passe de l’ombre à la lumière. Jean Castex est aujourd’hui entré à l’Hôtel de Matignon par la grande porte, succédant à Édouard Philippe. Inconnu du grand public, l’influent haut fonctionnaire de 55 ans a notamment coordonné le déconfinement du pays, en pleine crise du Covid-19. Désormais Chef du Gouvernement, il a pour tâche d’ouvrir une nouvelle page au quinquennat du Président.
Le « couteau suisse »
Énarque, issu de la Cour des Comptes, Jean Castex connaît parfaitement les arcanes du pouvoir. Le « couteau suisse », comme il est parfois surnommé, incarne une droite sociale, précieuse à Emmanuel Macron. Le nouveau Premier ministre a en effet travaillé aux Ministères de la Santé et du Travail, dirigeant les cabinets de Xavier Bertrand. Plus tard, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, dont il est proche, il a conseillé le Chef de l’État sur les affaires sociales, avant d’occuper le prestigieux poste de Secrétaire Général adjoint de l’Élysée.
Ce gaulliste expérimenté est aussi un homme de terrain. Il est maire de Prades, une commune de 6000 habitants des Pyrénées-Orientales. Il a d’ailleurs largement été réélu, avec 76 % des voix, lors des dernières Élections municipales. Cet engament d’élu local, déjà partagé par son grand-père sénateur, constitue pour lui un pilier essentiel pour toute carrière politique.
L’Homme du déconfinement
Avant de devenir récemment le « Monsieur déconfinement » du Gouvernement, Jean Castex a travaillé avec Édouard Philippe et Emmanuel Macron. Son nom avait même été évoqué en 2018, pour remplacer Gérard Collomb au Ministère de l’Intérieur. En outre, il est apprécié par l’exécutif pour sa connaissance des rouages du pouvoir et sa capacité à traiter des dossiers insolubles. Il s’est par exemple vu confier la gestion de la candidature de Paris aux Jeux Olympiques de 2024. Une réussite, du point de vue de l’Élysée, la candidature française ayant été accepté par le CIO grâce notamment au travail de ce « Ministre des Jeux ».
Toutefois, le principal défi qu’a dû accomplir Jean Castex dans sa carrière publique reste celui du déconfinement. Depuis le 2 avril dernier, il coordonnait en effet le retour progressif à la vie du pays, stoppée nette par l’épidémie de coronavirus. Il avait été choisi pour occuper ce poste stratégique en raison de son expérience, mais aussi de sa propension à « emporter l’adhésion de tous ceux qui décident localement », si l’on en croit Franck Louvrier. L’ancien conseiller de Nicolas Sarkozy voit en lui un homme capable de « prendre le pouls du pays ».
Le IIIème acte
Dans l’immédiat, Jean Castex devra proposer la composition d’un nouveau Gouvernement au Chef de l’État. Avant mercredi, date du Conseil des Ministres, l’Élysée dévoilera l’attribution des nouveaux portefeuilles. Emmanuel Macron veut faire de la démission d’Édouard Philippe un tournant dans son quinquennat. Une politique plus sociale, rendue nécessaire par la crise économique, et plus verte, devra être impulsée par la nouvelle équipe de Jean Castex. La perspective d’un tel changement laisse l’opposition perplexe, à l’image du Premier Secrétaire du PS Olivier Faure, pour qui « le jour d’après sera de droite comme le jour d’avant ». Éric Ciotti (LR) parle lui d’une dissolution de Matignon, et craint que la nomination d’un « technocrate » ne mène à une « dérive » d’Emmanuel Macron « vers un pouvoir totalement personnel et autoritaire ».
Par ailleurs, le Président de la République envisage déjà la prochaine Élection présidentielle de 2022. Pour beaucoup d’observateurs, nommer un profil plus technique à Matignon permettra à Emmanuel Macron de laisser une plus grande empreinte sur les réformes à venir. Concernant ces dernières, le Chef de l’État devrait prendre la parole pour en donner les orientations dans les prochains jours, avant que le nouveau Premier Ministre ne les détaillent dans sa déclaration de politique générale, devant la représentation nationale.