Le 21 janvier 2021, le Sénat a adopté à l’unanimité une proposition de loi « Billon » visant à criminaliser tout acte de pénétration d’un majeur sur mineur de moins de 13 ans.
Ce texte intervient pour protéger davantage la victime mineure d’une atteinte sexuelle.
La loi aujourd’hui
Aujourd’hui, tout acte sexuel d’un majeur sur un mineur de moins de 15 ans est puni par la loi. C’est ce qu’on appelle la « majorité sexuelle ».
Ainsi, en cas de preuve de non-consentement, si un majeur commet un acte sexuel avec pénétration sur un mineur de 15 ans ou moins il s’agira d’un viol, puni de 20 ans de réclusion criminelle.
Toutefois, si l’absence de consentement du mineur ne peut pas être prouvée, l’acte sexuel sera requalifié en atteinte sexuelle, puni de 7 ans d’emprisonnement.
Le problème soulevé par la proposition de loi
La législation actuelle ne précise pas d’âge en dessous duquel le non-consentement à l’acte sexuel avec un majeur est automatique.
Il est évident qu’un très jeune mineur ne peut pas consentir à un acte sexuel avec un majeur.
Pour autant, la législation actuelle peut laisser entendre le contraire, et demande à prouver le non-consentement pour le qualifier clairement de viol ou d’agression sexuelle (si pas de pénétration).
Dans la pratique, si la victime n’arrive pas à prouver son non-consentement, l’accusé peut repartir avec 7 ans d’emprisonnement, au lieu des 20 ans du viol.
Ce que propose cette proposition de loi
Cette proposition de loi vient donc renforcer la législation en vigueur.
Et pour cause, elle propose de punir de 20 ans de réclusion criminelle tout acte de pénétration commis par un majeur sur un mineur de 13 ans ou moins sans qu’il y ait lieu de prouver s’il était consentant ou non.
En clair, si la loi est adoptée définitivement, un mineur de 13 ans ou moins ne serait jamais considéré comme consentant en cas de rapport sexuel, avec pénétration, avec un majeur.
Enfin, entre 13 et 15 ans, la loi actuelle s’appliquerait.
Un texte qui fait débat
Quand bien même la majorité sexuelle n’a pas été abaissée à 13 ans, ce texte a soulevé de nombreux débats.
Certains dénoncent un flou juridique pour les 13-15 ans, d’autres demandent que le seuil soit fixé à 15 ans.
Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, a indiqué qu’il reste « un certain nombre de points qui méritent d’être travaillés », notamment sur le seuil à 15 ans qui présente « un vrai risque constitutionnel ».
Et pour cause, en 2018, la loi Schiappa avait tenté d’instaurer un seuil de non-consentement fixé à 15 ans.
Mais le Conseil d’État avec rendu un avis défavorable sur cette mesure. En effet, pour que cette loi soit jugée constitutionnelle « il faut, d’une part, qu’elle ne revête pas de caractère irréfragable et, d’autre part, qu’elle assure le respect des droits de la défense, c’est-à-dire permettre au mis en cause de rapporter la preuve contraire ».
Le Conseil d’État avait par exemple jugé que « la seule circonstance que l’auteur « ne pouvait ignorer » l’âge de la victime […] ne répond pas à l’exigence constitutionnelle relative à l’élément intentionnel en matière criminelle ».
Aussi, « en laissant subsister le délit de l’atteinte sexuelle sur mineur de quinze ans », un même comportement pourrait « tomber sous le coup de dispositions distinctes, sanctionnées différemment ».