“Un référendum portant sur un objet mentionné au premier alinéa [l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics] peut être organisé à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales. Cette initiative prend la forme d’une proposition de loi et ne peut avoir pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an.”

Ce que vous venez de lire, c’est l’alinéa 3 de l’article 11 de la Constitution de la Cinquième République française, ajouté à la Constitution en 2008 par ce que l’on appelle communément la “révision constitutionnelle de 2008”. Cette révision est notamment connue pour avoir mis en place ce que l’on appelle le référendum d’initiative partagée. En ces temps sociaux où les “Gilets jaunes” réclament un “référendum d’initiative citoyenne”, il convient de se demander ce qu’est ce référendum d’initiative partagée et pourquoi il est critiqué par une partie de la population.

Une histoire atypique

Le référendum d’initiative partagée, comme dit plus haut, est apparu lors de la révision constitutionnelle de 2008, sauf… qu’il n’était pas prévu ! En effet, le projet, soutenu par la gauche et proposé par la droite, s’est glissé lors de discussions sur le rééquilibrage des institutions de la Cinquième République qui portaient sur le Parlement. À l’époque appelé “référendum d’initiative populaire”, il faut attendre 2013 pour que des lois encadrent sa pratique, permettant donc de l’utiliser. Cependant, au 1er Janvier 2019, jamais aucun référendum d’initiative populaire n’a été voté.

Edouard Balladur, le père du référendum d’initiative Partagée (Crédit photo: Le Figaro)

Son Fonctionnement

Comment lancer un référendum d’initiative partagée ? Il suffit de recourir aux cinq étapes suivantes:

  1. Un cinquième des parlementaires (185 députés et/ou sénateurs) dépose la proposition de référendum sous forme de loi, appelée “loi référendaire”.
  2. Le Conseil Constitutionnel (Institution chargée du respect de la Constitution) vérifie que le projet de référendum a bien été déposé par au moins 185 parlementaires, que la proposition porte bien sur les thèmes définis par l’article 11 évoqués plus haut, que ceux-ci ont bien une incidence sur le fonctionnement des institutions françaises, que ce référendum n’a pas pour objectif l’abrogation (la suppression) d’une loi votée il y a moins d’un an et qu’il ne porte pas sur le même sujet qu’une proposition de loi rejetée par référendum il y a moins de deux ans. A cela s’ajoute, bien sûr, la vérification de la constitutionnalité du texte.
  3. Le Ministère de l’Intérieur lance le recueil (numérique) de soutiens du référendum. Il faut qu’au moins un dixième des électeurs inscrits sur liste électorale (personne ayant fait les démarches pour avoir une carte électorale) soutiennent le projet.
  4. Au bout de 9 mois de recueils de soutien, le Conseil constitutionnel vérifie si le seuil de 10% des électeurs ayant une carte électorale a bien été atteint.
  5. Si la proposition de loi n’a pas été examinée au moins une fois par chacune des deux chambres (Assemblée nationale et Sénat) dans un délai de six mois, le Président de la République la soumet au référendum.

Si toutes ces étapes sont respectées, le référendum d’initiative partagée peut-être soumis aux Français qui peuvent faire le choix d’adopter ou de rejeter la réforme.

Ses Critiques

Le problème se divisent en plusieurs branches distinctes. Viennent d’abord les reproches de 2008 critiquant un référendum qui, pour l’époque, semblait être la chasse gardée du PS et de l’UMP. Et pour cause, seuls ses deux partis pouvaient aligner 185 parlementaires pour proposer le référendum.

Ensuite, les critiques de la “course d’obstacle” qu’il faut franchir pour simplement proposer le référendum aux Français. La procédure en cinq étapes exprimées au dessus prend plus d’une année, ce qui fait que le référendum d’initiative populaire est plus un effet d’annonce qu’une réelle disposition politique.

Enfin, c’est la complexité de sa mise en place qui provoque les critiques actuelles. Déjà dénoncées par François Hollande, le temps qui s’écoule entre la proposition de référendum et son application potentielle, ses aller-retours au Conseil constitutionnel et la restrictivité des thèmes abordés seraient en fait un moyen de stopper l’élan démocratique qu’il engendre, et donc de n’en faire qu’une vitrine de démocratie, pas de la démocratie véritable.